Patriarche Youssef

« Bienheureux les artisans de paix »

3 8 2012

Damas, le 3 août 2012

 

 

« Bienheureux les artisans de paix »

 

Par ces mots, le Seigneur exalte ceux qui travaillent pour la paix, disant qu'ils « seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 9)

 

Par ces mots mêmes de l'évangile, j'aimerais expliquer l'attitude de l'Église au sujet du débat répandu quant à l'éventualité d'armer les chrétiens, en particulier à Damas :

 

1- Aucun officiel ne nous a jamais parlé d'armer les chrétiens.

 

2- Nous n'avons jamais contacté le moindre officiel dans ce sens, et nous n'avons jamais demandé que nos fidèles soient armés, que ce soit à Damas ou ailleurs.

 

3- Nous n'avons jamais envisagé – et ne le ferons jamais – d'armer notre communauté.

 

4- Plus encore, nous estimons que toute tentative d'armer les chrétiens, à quelque endroit qu'il se trouvent, implique un danger de conflit confessionnel et expose les zones à prédominance chrétienne à des attaques d'origine inconnue.

 

5- Nous appelons nos fidèles, dans toutes les paroisses, à refuser toute offre d'armes. Nous leur rappelons l'enseignement de Notre Seigneur Jésus-Christ : « celui qui saisira l'épée périra par l'épée » (Mt 26, 52) ; et également : « heureux les doux, car ils hériterons la terre... heureux les artisans de paix, car ils seront appelés fils de Dieu » (Mt 5, 5 & 9)
 

6- Nous rappelons de même les enseignement de saint Paul : « autant qu'il dépend de vous, efforcez-vous de vivre en paix avec tous, si possible » (Rm 12, 18).

 

Notre rôle de chrétien est celui de la médiation et de la réconciliation. Il nous invite à construire des ponts entre les enfants d'une même patrie. C'est la plus belle œuvre que nous pourrions entreprendre pour notre pays, la Syrie, pour nos frères et sœurs concitoyens de toute dénomination, quelle que soit leur appartenance politique, tribale , régionale ou idéologique.

 

7- Nous n'avons jamais arrêté de lancer des appels dans ce sens, depuis la survenue de la crise en mars 2011. C'est le rôle de l'Église et de ses pasteurs – patriarches, évêques, prêtres – ainsi que des moines, moniales et fidèles laïcs impliqués dans les différents secteurs d'activité et de service de l'Église. Nos Églises, écoles, institutions et associations doivent être des écoles de paix, de vertu, d'amour, d’authentique citoyenneté et de respect pour tous.

 

8- Je rappelle la déclaration de feu le patriarche œcuménique de Constantinople, Anathématisas Ier : « je n'ai plus peur, parce que j'ai abandonné mes armes ».

 

C'est à cela que notre Seigneur nous appelle dans son évangile ; « Je suis, n'ayez pas peur ! » (Mt 14, 27 ; Mc 6, 50 ; Jn 6, 20). Et aussi : « Ne craignez rien, j'ai vaincu le monde ! » . Jean l'évangéliste, de son côté, nous dit : « et telle est la victoire qui a triomphé du monde : notre foi » (1J 5, 4). Ajoutons : la foi dans nos frères, dans notre patrie, et dans nos authentiques valeurs nationales.

 

Nous prions Dieu de bien vouloir ramener la paix dans le cœur de tous les syriens, de façon à ce que nul n'ai besoin d'armes ou n'ait à craindre des massacres, car ils vivront ensemble, comme les fils d'une même famille et d'une même patrie.

 

Nous l'implorons : Dieu de paix, accorde la paix à notre nation !

 

 

+ Grégorios III

Patriarche d'Antioche et de tout l'Orient

d'Alexandrie et de Jérusalem